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« Le congé paternité doit être égal au congé maternité, obligatoire et bien rémunéré »

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Publié le 15.06.2021 à 15h17 
(mis à jour le 21.06.2021 à 10h56)

Les devoirs liés à la naissance d’un enfant restent majoritairement incombés aux mères. Pour rééquilibrer la balance, il faut un congé paternité obligatoire et égal à celui des mères, estime Violaine Dutrop dans son essai « Maternité, Paternité, Parité »

« Ce que je revendique, c’est qu’on ait un congé paternité qui soit aussi long pour les pères -ou les deuxièmes parents- que pour les mères », clame Violaine Dutrop. L’idée peut paraitre étrange : pourquoi accorder aux pères ou deuxièmes parents le même congé qu'aux mères, alors même qu’ils.elles ne supportent -physiquement, en tout cas- ni la grossesse, ni l’accouchement, ni le post-partum ? Et pourtant, c’est bien pour promouvoir plus d’égalité entre hommes et femmes que Violaine Dutrop défend ce paradigme, et pour « changer politiquement la façon dont les rôles sont organisés entre les femmes et les hommes dans notre société. »

Une meilleure justice sociale

Car, même si sa durée a été allongée, le congé paternité qui existe aujourd’hui en France reste un frein à l’égalité entre hommes et femmes, estime Violaine Dutrop :

« Pour moi le congé paternité tel qu’il est défini est un verrou qui organise et institutionnalise la passivité des hommes, par rapport à une implication banalisée des femmes. C’est dommage pour les hommes qui voudraient s’impliquer, puisque ce n’est pas assez normalisé. Et c’est dommage de réserver ce rôle aux femmes, qui ont besoin aussi d’être à parité. C’est une question de justice sociale. »

Plus d’égalité face à l’employeur

Une durée de congé équivalente permettrait notamment une meilleure égalité face au travail, dans une société où malheureusement de nombreux employeurs continuent, à compétences équivalentes, à favoriser les hommes :

« La durée équivalente est très importante, pour qu’on ait la même possibilité de s’absenter, qu’on soit homme ou femme, de façon à ce que les employeurs ne fassent pas de différence, aussi bien au recrutement mais aussi pour les évolutions de carrière. » 

L’obligation à prendre ce congé est aussi un point important, selon Violaine Dutrop :

« Il est essentiel que nous n’ayons pas à négocier, du côté deuxième parent, l’absence pour cause de nouvelle parentalité. L’obligation devrait permettre à tout employeur, mais aussi au nouveau parent, de se retirer du travail, au même titre que la mère. »

Un enjeu de santé publique

Combien de dépression du post-partum pourraient être évitées si les mères étaient accompagnées, pendant toute la durée de leur congé maternité, par le second parent ? Violaine Dutrop explique :

« On demande trop aux mères ! Les solidarités familiales sont de nos jours plus difficiles à convoquer : on habite loin de ses proches, etc. C’est important d’admettre collectivement, que quand un enfant nait, la famille a besoin de ralentir, de s’extraire de ses activités habituelles, et que ça doit se faire à plusieurs. Seule, c’est douloureux, difficile, parfois intenable. Il y a beaucoup d’écrits sur le post-partum qui vont dans ce sens. »

Un congé égalitaire permettrait également à l’enfant de connaitre une double figure d’attachement plus équilibrée, avec un second parent plus investi dans sa vie, mais aussi moins de charge mentale pour les mères, et un partage des tâches domestiques et familiales plus juste, permettant de prendre les bonnes habitudes dès le départ.

Mais notre société est-elle enfin prête à entendre ces revendications ? Sans aucun doute, selon Violaine Dutrop :

« Le moment est propice à se poser cette question, quand on voit que des entreprises s’intéressent à ce sujet, mettent en place des congés plus longs pour le deuxième parent. On a aussi des jeunes qui sont de plus en plus friands d’équilibre des temps de vie, pour ne plus organiser leur vie autour du travail, équilibrer leurs rôles sociaux, avoir des vies plus saines et plus équilibrées. »

Maternité, paternité, parité, aux Éditions du Faubourg, 12,90€.

Marion Cousin